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Agression homophobe au centre-ville d’Alma : Marc-André Fortin veut encourager la dénonciation

Le 30 mars 2020 — Modifié à 09 h 08 min le 30 mars 2020
Par Julien B. Gauthier

Un jeune homme a été victime d’une agression à caractère homophobe au centre-ville d’Alma peu avant minuit, le 13 mars dernier. Avec trois amies, Marc-André Fortin tentait d’entrer au Lion Bleu lorsque six individus qui se trouvaient à l’extérieur l’ont insulté, bousculé, harcelé et empêché d’entrer dans le bar.

Un cirque qui aura duré 15 minutes, mais qui a paru une éternité pour l’étudiant en théâtre à Saint-Hyacinthe qui était en visite dans sa région natale. Celui-ci a également été blessé au visage pendant les bousculades.

Tous âgés dans la début vingtaine, Marc-André Fortin connaissait de vue les six agresseurs, qui l’ont d’abord insulté verbalement, dénigrant son orientation sexuelle.

Marc-André a été blessé lors de l'agression.

« Moi et mes amies sommes arrivés centre-ville en taxi. En débarquant du véhicule, ces gars, qui fumaient dehors, se sont mis à m’insulter sur mon orientation sexuelle et m’ont bloqué l’entrée de la microbrasserie », raconte le jeune homme.

Et plutôt que de lui permettre d’entrer à l’intérieur, les portiers du Lion Bleu auraient plutôt fermé les yeux, selon Marc-André, en ordonnant à lui et à ses assaillants de « continuer leur job à l’extérieur », sur le trottoir.

À l’extérieur, les insultes ont continué et des balles de neige et de glace ont été lancées à Marc-André, qui était accompagné de seulement une amie, les deux autres ayant pu accéder au bar.

« Je pleurais à chaudes larmes. C’est à ce moment que ma soirée a été scrappée. »

Encourager la dénonciation

Marc-André a partagé son histoire sur Facebook non seulement pour dénoncer son agression, mais aussi pour encourager les autres à faire de même. « Lorsque ça arrive, je ne souhaite pas que les victimes se cachent avec la honte d’être homosexuel. Moi, je leur dit : allez-y, dénoncez! », affirme l’étudiant en théâtre.

Et même s’il a reçu une grande vague d’appui en agissant ainsi, il a cependant reçu son lot d’insultes en messagerie privée.

« J’ai eu beaucoup de soutient, mais j’ai aussi reçu des messages haineux. Je me suis fait dire d’arrêter de brailler, que la seule solution est d’arrêter les gais, que ce n’était qu’une simple égratignure, que mes agresseurs avaient raison… »

Par ailleurs, c’était la première fois de sa vie que Marc-André Fortin subissait de l’homophobie. Selon lui, même si on est en 2020, il y a encore beaucoup de chemin à faire, ce dernier citant en exemple la violente agression du designer montréalais Mark-Antoine Lynch Boisvert et de son conjoint à Charlevoix, une histoire qui avait fait le tour du Québec l’été dernier.

Pour ce qui est de la suite des choses, Marc-André pourrait éventuellement porter plainte à la police.

Le Lion Bleu condamne

Pierre Harvey, propriétaire du Lion Bleu condamne le geste, qui ne correspond pas aux valeurs de la microbrasserie. Il confie d'ailleurs que l'un des agresseurs est un individu problématique, qui avait déjà été banni du bar, mais dont une deuxième chance avait été accordée. « Il est barré à vie », affirme sans hésiter M. Harvey.

AGL-LGBT Saguenay-Lac-Saint-Jean : Pas un geste isolé, selon Daniel Gosselin

Le directeur général de l’association des gais et lesbiennes – LGBT du Saguenay-Lac-Saint-Jean, Daniel Gosselin, rappelle que les histoires de ce genre ne sont pas anecdotiques. Félicitant Marc-André Fortin pour sa dénonciation sur les médias sociaux, il l’encourage à aller plus loin en prenant des mesures légales.

« L’association est derrière lui. Il faut le faire, il faut dénoncer, il faut parler, il ne faut pas garder ça dans l’ombre. Porter plainte? Oui, absolument, affirme d’emblée le militant LGBTQ+. Ce n’est pas un cas isolé, malheureusement. Ça arrive encore qu’il y ait des gestes d’homophobie ou même de transphobie quand tu vas au bar. »

Il rappelle que les agressions ne se font pas seulement qu’en public. Les médias sociaux sont également un lieu où le fiel homophobe est versé allègrement.

« Sur les médias sociaux, c’est particulièrement problématique. Marc-André l’a vécu suite à sa dénonciation. On dirait qu’il n’y a pas de filtre. Les gens s’entrainent entre eux et ça peut faire perpétuer l’ignorance », déplore-t-il.

En 2013, la Fondation Émergence rappelait notamment que 58 % des Canadiens avaient été témoins de propos homophobes sur les médias sociaux.

Un manque d’éducation

D’où vient donc l’homophobie? La famille, dont les parents en sont pour quelques chose. Il arrive effectivement que ces préjugés puissent être transmis de génération en génération.

Le rôle de l’école entre donc en ligne de compte.

« Il y a un problème de manque de connaissances. Certes, les parents ont un rôle à jouer. Mais l’école aussi. Il faut des cours d’éducation à la sexualité avec des gens spécialisés en la matière. », souhaite-t-il.

Vouloir être cool devant ses amis est également un facteur d’influence sur les comportements, selon Daniel Gosselin. Et contrairement à la croyance populaire, les gestes homophobes ne sont pas plus répandus en région que dans les grands centres.

Des statistiques alarmantes

Chaque 17 mai, à l’occasion de la Journée mondiale contre l'homophobie et la transphobie, la Fondation Émergence publie des données statistiques concernant l’homophobie au Canada et au Québec.

Ainsi, nous apprenions en 2015 que 72 % des Canadiens affirment avoir déjà été témoins de propos désobligeants ou de comportements irrespectueux à l’égard des personnes LGTBQ+.

Par ailleurs, une étude du Fonds de recherche Société et culture du gouvernement du Québec concluait qu’en 2018, près de quatre élèves du secondaire sur dix (38,6 %) rapportaient avoir été victimes d'un incident à caractère homophobe en milieu scolaire, parce qu'ils sont ou parce qu'on pense qu'ils sont gais, lesbiennes ou bisexuel-les.

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