Culture

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Guerre des Tuques : le cinéaste André Melançon s'est éteint

Le 24 août 2016 — Modifié à 00 h 00 min le 24 août 2016
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CINÉMA. André Melançon, réalisateur notamment du film-culte «La Guerre des tuques», est décédé mardi soir à l'âge de 74 ans, a indiqué le producteur Roch Demers. Il souffrait depuis quelques années de leucémie.

Au cours de sa carrière qui s'est étalée sur plus de 40 ans, André Melançon, ancien psychoéducateur, a réalisé notamment quatre «Contes pour tous»: «La Guerre des tuques», le tout premier, en 1984, puis «Bach et Bottine» (1986), «Fierro, l'été des secrets» (1989) et «Daniel et les Superdogs» (2004). Il a aussi participé à l'écriture de «La Grenouille et la Baleine» en 1988 et de «La Gang des hors-la-loi» en 2014, 24e Conte pour tous, où il y jouait aussi un petit rôle.

Les parents, jeunes ou vieux, ont aussi vu d'autres films du réalisateur-scénariste: le suspense policier «Rafales», avec Marcel Leboeuf et Denis Bouchard, la minisérie «Cher Olivier», avec Benoît Brière, ou le documentaire «Les Vrais Perdants», par exemple.

Né à Rouyn-Noranda le 18 février 1942, André Melançon fait son cours classique en Abitibi puis part un an au Pérou — il demeurera toujours près de la culture latino-américaine. Revenu au Québec, il travaille comme psychoéducateur auprès des jeunes — déjà — à l’Institut de rééducation de Boscoville, avant de passer au cinéma, d'abord en documentaires à l'Office national du film. Ses premières fictions mettront en scène des enfants, dans trois courts métrages pour l'ONF en 1974, notamment «Les Oreilles mènent l'enquête».

Mais c'est en 1978 qu'André Melançon retient l'attention des plus grands, avec le documentaire très émouvant «Les Vrais Perdants», sur la façon dont certains adultes «poussent» les enfants à s'accomplir — par procuration, peut-être — au hockey, au piano ou à la gymnastique. Trente ans plus tard, il retrouvera ses trois protagonistes dans «L'Âge de passion».

Et au début des années 1980, le producteur Roch Demers, qui souhaite développer le créneau «film jeunesse», notamment pour l'international, se tournera tout naturellement vers le «cinéaste de l'enfance» pour réaliser son premier «Conte pour tous»: la célèbre «Guerre des tuques», qui connaîtra en 1985 un énorme succès aussi bien au Québec que dans les festivals à l'étranger.

Après trois «Contes pour tous», André Melançon réalise en 1990 «Rafales», un suspense psychologique en pleine tempête de neige, qui pose aussi un regard critique sur les médias. Le cinéaste réalise aussi... que l'hiver est impitoyable pour un tournage de film, et il promet qu'on ne l'y reprendra plus.

Puis, en 1997, André Melançon écrit et réalise une minisérie sur le comédien Olivier Guimond, qui connaîtra un grand succès populaire et critique, et raflera les Gémeaux cette année-là. Une autre série télévisée, «Ces enfants d’ailleurs II» (1998), tirée d’un roman d’Arlette Cousture, connaîtra moins de succès.

C'est aussi lui qui a immortalisé sur vidéo la production «mythique» de 1995 d'«Albertine en cinq temps», de Michel Tremblay, montée à l'Espace GO par Martine Beaulne, avec une distribution remarquable, dont sa conjointe, Andrée Lachapelle — mais aussi Macha Limonchik, Élise Guilbault, Sophie Clément, Monique Mercure et Guylaine Tremblay.

Son dernier film, le documentaire «Les Trains de la vie» (2013), suit Kees Vanderheyden, qui fait le tour des écoles primaires pour raconter aux jeunes les événements qui ont bouleversé sa jeunesse dans son pays d’origine, les Pays-Bas, durant l’occupation allemande.

André Melançon s'est fait aussi acteur pour de petits rôles, notamment dans «Taureau» de Clément Perron, «Réjeanne Padovani» et «Joyeux Calvaires» de Denys Arcand, ou «Le Côté obscur du coeur» de l'Argentin Eliseo Subiela (1992). Amoureux des acteurs, il a été entraîneur pendant plusieurs saisons à la Ligue nationale d'improvisation, dans les années 1980.

Il a aussi enseigné à l'École nationale de théâtre du Canada à Montréal, et a été un membre fondateur de l'Institut national de l'image et du son (INIS), où il a prodigué ses connaissances une dizaine d'années aux étudiants en cinéma, mais aussi aux jeunes acteurs. Malgré la maladie, qui avait ses hauts et ses bas, il y donnait encore l'an dernier des cours à des acteurs, en collaboration avec l'École nationale.

Après avoir reçu du gouvernement du Québec en 2012 le prix Albert-Tessier, plus haute distinction dans le domaine du cinéma, puis l'insigne d'officier de l'Ordre national l'année suivante, André Melançon avait obtenu l'hommage suprême de ses pairs lors de la 17e Soirée des Jutra, en 2015. Toujours humble et d'une grande simplicité, le lauréat du «Prix hommage» avait alors rendu... hommage à ses prédécesseurs du cinéma québécois, à ses contemporains et à tous ceux qui prendront la relève.

«Étonnez-nous, questionnez-nous, bousculez-nous! Faites-nous rire, faites-nous pleurer; c’est important. Faites nous penser; c’est important. Faites nous rêver; c’est essentiel!»

Mario Gilbert, La Presse Canadienne

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